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07/21/2009
John Dowland : The Seven Shades of Melancholy (fantaisies, consorts et airs)

Dorothee Mields (soprano), Lee Santana (luth), Hille Perl (viole de gambe et direction)
Enregistré à l’église Saint Georges de Sengwarden, Allemagne (19-21 novembre 2007) – 66’30
Deutsche Harmonia Mundi 88697362132 (distribué par Sony) – Notice trilingue (allemand, anglais et français)






En Angleterre, la période de transition entre les XVIe et XVIIe siècles fut extrêmement riche dans le domaine musical notamment grâce aux mécènes que furent les souverains de l’époque. Ainsi, nombre de compositeurs firent l’objet de commandes, essentiellement destinées au luth et à la voix, sous forme de madrigaux ou de courtes pièces destinées à être jouées dans des cercles d’amateurs nobles et éclairés. On peut citer les noms de Daniell Batchelar (1574-1618) qui fut longtemps au service de la reine Anne et qui collabora de manière fructueuse avec les Dowland père et fils, Philip Rosseter (1568-1623), membre actif de la Chapelle royale à partir de 1604, Thomas Campion (1567-1620) et Robert Jones (1577-1615), qui laissa cinq gros volumes de mélodies destinées au luth, sans compter un autre de madrigaux, cette période étant close par les hautes figures de John Jenkins (1592-1678) et John Attey, qui publie en 1622 le dernier recueil d’œuvres pour luth avant que cet instrument ne tombe dans l’oubli pour retrouver quelque lustre dans les années 1660 sous la houlette de Henry Purcell.


Au sein de ce foisonnement musical, John Dowland (1563-1626) figure incontestablement parmi les compositeurs les plus doués et les plus prolifiques. Né à Londres (à moins que ce ne soit à Dublin ou Westminster), il fit l’apprentissage du luth alors qu’il était au service d’un noble du Kent, Sir Henry Cobham (1537-1591). Il accompagna ce dernier à Paris en 1580 : c’est une étape fort importante pour Dowland puisque c’est au contact de la vie artistique française et de la musique jouée à la Cour qu’il se frotta au genre spécifique de « l’air de cour », qui l’influencera beaucoup par la suite. Passé ensuite par l’Italie où il fut musicien de diverses cours, il regagna l’Angleterre à la fin de l’année 1596 pour servir brièvement auprès de la reine Elizabeth ; c’est à Londres qu’il publie son premier recueil destiné au luth en 1597. Musicien à la cour du roi du Danemark en 1598, il revient à la cour du roi d’Angleterre, Jacques Ier, à partir de 1612 en qualité de luthiste ; il décède à Londres en février 1626. Au sein d’une vaste œuvre, il laisse essentiellement des pièces pour voix et pour luth qui fut, comme on l’a déjà souligné, son instrument de prédilection.


Le présent disque, « The Seven Shades of Melancholy » (« Les sept nuances de la mélancolie »), est une anthologie qui illustre à merveille la délicatesse des compositions de John Dowland. Echo à la pièce célèbre Lachrimæ or Seaven Teares figured in Seaven Passionate Pavans (« Pleurs ou sept larmes illustrées par sept pavanes passionnées »), elle présente tour à tour des airs pour luth seul, pour luth et viole de gambe et pour voix accompagnée d’un ou deux instruments. Comme dans ses précédents disques consacrés notamment à Sainte-Colombe et Marin Marais, Hille Perl donne à nouveau une interprétation emplie de finesse : la première pièce, « Forlorn Hope Fancy », permet d’entendre un instrument aux tons plaintifs mais davantage sur le registre du recueillement que sur celui de la simple déploration. « Lachrimæ Amantis » confronte quant à elle le luth avec la viole de gambe : jeu de question/réponse, mélodies jouées en canon, en doublon… ou l’art de dire beaucoup avec une évidente économie de moyens ! Les accents joyeux reprennent quelque peu le dessus dans l’air « Captain Digorie Piper his Galiard », rappelant l’ambiance festive qui pouvait se jouer dans les tavernes des ports de Londres ou d’autre ville d’Angleterre. A chaque instant, Lee Santana est un compère de choix : l’entente entre les deux instrumentistes est évidente et culmine dans un bouleversant « Semper Dowland, semper dolens » où la large respiration du luth et de la viole donne aux phrases une grandeur pleine de révérence.


Depuis plusieurs années déjà, on admire la voix de Dorothee Mields, particulièrement à son aise dans le répertoire baroque, notamment chez Johann Sebastian Bach qu’elle a enregistré aussi bien sous la direction de Masaaki Suzuki que de Philippe Herreweghe. En plus d’une occasion, on est ici frappé d’entendre des mélodies qui, à bien des égards, préfigurent certaines compositions de Georg Friedrich Händel : les parallélismes entre « Time stands still » et le chœur conclusif d’Israël en Égypte, entre « Clear or Cloudy » et certains Anthems du compositeur saxon sont frappants. Douce et toujours passionnée, Dorothee Mields séduit constamment dans une musique aux tonalités le plus souvent funèbres. On soulignera notamment son « Sorrow, sorrow stay, lend true repentant teares » où la voix joue habilement sur la sonorité des mots prononcés (« but down, down, down I fall ») faisant ainsi oublier, l’espace d’un instant, les tourments qui frappent l’être humain ici-bas.


Sébastien Gauthier

 

 

 

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