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02/20/2009 Carl Orff : Carmina burana
Lisa Griffith (soprano), Ulrich Ress (ténor), Thomas Mohr (baryton)
Frankfurter Singakademie, Karl Rarichs (direction), Figuralchor Frankfurt, Alois Ickstadt (direction), Kinderchor des Goethegymnasiums, Peter Ickstadt (direction), Kinderchor Frankfurt, Gerhardt Roth (direction), Koninklijke Filharmonie van Vlaanderen, Muhai Tang (direction)
Enregistré en public à Francfort (3 octobre 1993) – 55’24
Wergo WER 6602-2 (distribué par DistrArt)
Carl Orff (1895-1982) chez Wergo, dont la réputation s’est pourtant faite avec l’avant-garde germanique? Il faut néanmoins se souvenir que le label, associé à l’éditeur Schott, a par ailleurs largement diffusé la musique de Jean Françaix. Du compositeur bavarois, controversé pour le statut que lui reconnut le Troisième Reich, le catalogue de Wergo comprend un DVD et plusieurs disques, dont les incontournables Carmina burana (1936), captés en concert sur le lieu même de leur création, à l’Opéra de Francfort.
Voici plus de quinze ans, la Philharmonie royale flamande d’Anvers ne s’appelait pas encore «deFilharmonie», et Muhai Tang (né en 1949) – devenu entre-temps chef principal de l’Opéra national finlandais (2003-2006) et, depuis 2006, directeur artistique de l’Orchestre de chambre de Zurich – en était le chef principal (1991-1995), en même temps que directeur musical de l’Orchestre du Queensland (1990-1995) et directeur musical de l’Orchestre Gulbenkian (1988-2001). Après des débuts éclatants sous la protection de Karajan mais aussi de Bernstein, le chef chinois a donc mené ensuite une carrière relativement plus discrète: dommage, à en juger par cet enregistrement qui, sans révolutionner une discographie où ne les bonnes versions ne manquent pas (deux dirigées par Jochum chez Deutsche Grammophon, Ormandy chez Sony, ...), témoigne d’une approche tout à fait pertinente de l’œuvre.
En effet, sous sa baguette rapide et sèche, loin de tout flonflon romantique, ces Carmina burana percussifs et objectifs avouent plus que jamais leur dette envers Stravinski – celui de Noces – ou même Hindemith. Animés par une constante vitalité rythmique, les numéros s’enchaînent souvent attacca, l’ensemble contribuant à créer un élan irrésistible. Formés d’amateurs, les chœurs adhèrent pleinement à cette vision, même s’ils peinent parfois à suivre: il faut toutefois conserver à l’esprit qu’il s’agit, dans une excellente prise de son de la Radio de Hesse, d’un enregistrement public, ce qui justifie par ailleurs quelques décalages ou hésitations. Sans s’illustrer particulièrement par sa couleur ou son éclat – mais le faut-il ici? – l’orchestre n’en offre pas moins des soli de qualité (flûte, basson). Quant aux trois solistes, ils emportent la conviction, qu’il s’agisse de Thomas Mohr, abbas cucaniensis au délire éthylique très étudié, d’Ulrich Ress, «cygne» au style élégamment ironique («Olim lacus colueram»), ou de Lisa Griffith, en péril dans le redoutable «Dulcissime», mais au chant point trop sucré.
Revenant notamment sur les partitions antérieures à cet «opus 1», détruites par Orff, la notice (en allemand, anglais et français) ne manque pas d’intérêt, mais elle souffre hélas d’une version française très approximative, persistant par exemple à parler de «la Carmina Burana» ou bien traduisant Satz par «phrase», au lieu de «mouvement», et «Regie» par «le régie» (sic), au lieu de «mise en scène».
Simon Corley
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