About us / Contact

The Classical Music Network

CD

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

01/13/2009
Klaus Huber : Miserere hominibus pour sept chanteurs et sept instrumentistes – Agnus Dei cum Recordatione pour quatre chanteurs, luth et deux vièles (*)

Les Jeunes Solistes: Céline Boucard, Anne-Marie Jacquin (sopranos), Maryseult Wieczorek (mezzo-soprano), Magid El-Bushra, Pascal Bertin (*), Raoul Le Chenadec (*) (contreténors), Laurent David, Edouard Hazebrouck, Bruno Boterf (*) (ténors), Jean-Christophe Jacques, Jean-Louis Serre (*) (barytons), Jean-Louis Paya (*) (basse) – Jean-Luc Menet (flûtes), Olivier Voize (clarinettes), Jérôme Blum (*) (luth), Caroline Delume (guitare et théorbe), Isabelle Daups (harpes), Gérard Siracusa (percussions), Svava Bernhardsdottir (*), Igor Pomykalo (*) (vièle), Pierre-Henri Xuereb (alto et viole d’amour), Walter Grimmer (violoncelle), Nicolas Crosse (contrebasse)
Enregistré à l’Eglise Notre-Dame du Liban, Paris (17 et 18 février 2008) et à la Collégiale Saint Martin de Champeaux, Seine-et-Marne (28 août 1992) (*) – 54’33
Soupir Editions S216 (distribué par Harmonia mundi) – Notice en français, anglais et allemand






Rachid Safir et son ensemble vocal Les Jeunes Solistes entretiennent des relations privilégiées avec Klaus Huber depuis le début des années 1990 quand l’excellence de leur interprétation de ses Cantiones de circulo gyrante avait attiré l’attention du compositeur helvète. Ils étaient destinés à s’entendre: l’ensemble Les Jeunes Solistes s’ouvre avec tout autant d’aisance à l’ensemble de la polyphonie vocale, de la Renaissance à nos jours, et aime à confronter des œuvres d’époques éloignées; Klaus Huber puise en partie son art du contrepoint dans l’art polyphonique de la Renaissance tout en l’associant comme une évidence à son sérialisme particulier ou encore aux tempéraments inégaux tel celui des maqâmât arabes aux tiers de ton. Fruits de leur riche collaboration, naissent trois œuvres dont les Lamentationes Sacrae et Profanae de 1997, conçues comme un complementum aux Responsoria de Gesualdo, rencontre directe entre le contemporain et la Renaissance italienne. Des deux œuvres de la présente sélection, Miserere Hominibus (2006) est la troisième que Klaus Huber compose à leur intention à la suite d’une requête de Rachid Safir, et Agnus Dei cum Recordatione, capté en 1992 mais jamais encore porté au disque, la toute première.


Humaniste au grand sens éthique, Klaus Huber met son intense expressivité au service de l’idéal d’une musique vocale qui, par la mise en valeur de textes soigneusement sélectionnés, susciterait une réflexion politique et sociale et ferait éclore un profond désir de justice et d’équité, cela sans concession aucune à ses exigences primordiales, proprement musicales. Miserere Hominibus est une méditation sur la vie moderne et la réification de l’homme en onze segments au caractère à chaque fois différent, rythmés par la récurrence du Psaume LI et par trois Canciónes désolées d’El Cántaro roto d’Octavio Paz. Les quatre autres textes, parfois plus percutants, sont respectivement de Mahmoud Darwich, de Carl Amery, de Jacques Derrida et de l’ordinaire de la messe. L’œuvre est écrite pour sept voix et sept instruments, les quatorze musicalement indépendants, solistes au sens propre, sans cesse éclatés ou réunis dans le raffinement d’une grande densité contrapunctique aux frottements harmoniques. Le texte d’Amery, d’esprit plus direct, est traité comme une rupture stylistique, les heurts instrumentaux et la relative violence musicale devenant une résistance esthétique au culte d’un Mammon symbolique, le cri réitéré du mot «Wachstum» («croissance») à l’appui. La précision, la pureté, la force et la qualité individuelle des voix des Jeunes Solistes communiquent les angoisses, quêtes et interrogations de l’œuvre (les textes chantés chacun dans la langue d’origine) sans jamais en négliger la rigueur compositionnelle, la poésie et la beauté musicale. Tout comme l’impeccable mise en place vocale, Rachid Safir soigne l’irisé du détail instrumental. Il s’en dégage une fine émotion musicale tout particulièrement lors du prélude mouvant et statique du dixième volet aux reflets lumineux instables.


Dans le but de relier le sens profond de ces deux œuvres de miséricorde, le dernier mouvement est une recomposition des trois énonciations du texte de l’«Agnus Dei» tirées de l’Agnus Dei cum Recordatione pour quatre chanteurs, luth et deux vièles de 1990-91, seconde œuvre de cet enregistrement. L’exercice ne manque pas d’intérêt sur le plan musical, l’instrumentation du Miserere ayant un impact tout autre, le tutti vocal et instrumental étoffant à bon escient la partie centrale et le style musical des «Agnus Dei» établissant pour la nouvelle œuvre un lien fort entre présent et tradition par les sonorités clairement évocatrices de la Renaissance de Johannes Ockeghem.


L’Agnus Dei cum Recordatione porte la mention «Hommage à Johannes Ockeghem» après le titre. Si l’inspiration stylistique du contrepoint des trois «Agnus Dei» de cette première œuvre se puise dans la Missa prolationum d’Ockeghem sans perdre la touche contemporaine, les intervalles, les traits instrumentaux et le rythme d’énonciation du Recordatio sonnent de manière résolument de notre temps. L’Agnus Dei cum Recordatione est en cinq volets, le Recordatio en deuxième et quatrième position. Il s’agit, pour ce dernier, d’un texte de Gosta Neuwirth (traduit en français du XVe siècle par Pierre Bec), dont le protagoniste est un Ockeghem sur le point de quitter sans regret le monde déstabilisant de 1497. Jean-Louis Serre lui prête le clair velouté de sa voix de baryton avec toute la sensibilité et la distance nécessaires. La finesse et la grande précision de l’interprétation limpide et élégante des Jeunes Solistes restituent tout le calme désarroi et la foi profonde de cette œuvre éloquente.


Le site de Klaus Huber
Le site des Jeunes Solistes


Christine Labroche

 

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com