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10/09/2008
Gustav Mahler : Symphonie n° 10 (version Cooke)
Wiener Philharmoniker, Daniel Harding (direction)
Enregistré au Musikverein de Vienne (octobre 2007) – 78’00
Deutsche Grammophon 477 7347 (distribué par Universal) – Notice trilingue (anglais, français, allemand) d’Edward Seckerson





La version Cooke de la Dixième symphonie de Mahler divisera toujours : dans le journal de l’Opéra national de Paris, Pierre Boulez réaffirmait encore récemment que diriger autre chose que l’Adagio initial relevait de l’«absolument inacceptable» et même du «mensonge». On regrette de devoir dire que l’interprétation de Daniel Harding prolonge le trouble que certains peuvent ressentir face à la «version de concert» établie par Deryck Cooke entre 1976 et 1989, tant elle paraît, à de trop nombreux moments, éloignée de l’esprit et du style mahlériens. Pourtant, entendre – enregistré dans des conditions sonores optimales – le Philharmonique de Vienne dans Mahler reste une expérience forte, qu’illustre l’entrée sublime des cordes au début de l’Adagio, mouvement dont la paternité mahlérienne est incontestable. La mélodie semble avancer tout en se traînant, comme mue par le poids d’une force monumentale et pourtant condamnée à la lenteur. Cette saisissante lave symphonique, qui n’occulte pas les stridences de la partition, fait du premier mouvement le plus réussi de ce disque par ailleurs très soigné.


Le trouble vient après. Et il vient du chef, dont le travail sur la puissance et la clarté est certes intéressant, mais qui conduit à couler ces pages dans une sorte d’hédonisme transformant cette «version de concert» en expérience purement sonore plutôt qu’en introspection de l’univers mahlérien. Ce vice est d’autant plus perceptible que se déroule une partition dont la lettre se fait de moins en moins authentique et qui requiert, précisément, un véritable effort stylistique d’interprétation pour ressusciter l’esprit du compositeur autrichien. Dès le deuxième mouvement, on sent que le chef (né en 1975) trace une voie très personnelle, qui semble regarder vers le XIXe siècle et en oublie Mahler… alors qu’on attendrait précisément, dans cette œuvre, que fût esquissée voire projetée la direction – radicalement moderne – vers laquelle se serait orientée la musique d’un compositeur décédé à seulement 50 ans. La notice s’ouvre sur l’affirmation suivante : «Daniel Harding a fait énormément de choses en trente-deux ans. "En fait, à trente-deux ans, j’approche la cinquantaine!", dit-il d’un air narquois, faisant allusion à l’âge de Mahler lorsqu’il acheva sa Neuvième symphonie et commença à esquisser sa Dixième. C’est sa façon de réfuter gentiment les thèses de ceux qui, dans les institutions de la musique classique, croient encore que certaines œuvres – en particulier les œuvres "tardives" – devraient être interdites à tous sauf aux plus âgés». Dans le cas présent – et tout aussi «gentiment» –, on se permettra de mettre en doute cette certitude.


Malgré un final scintillant, on cherche en vain, dans le Scherzo, le mordant et le second degré. Le Purgatorio s’éloigne encore davantage des rivages de l’Attersee pour rejoindre de très idiomatiques contrées champêtres (les vents) ou sylvestres (la harpe), qui ne manquent évidemment pas de charme… mais dérivent inéluctablement vers les bords du hors-sujet. D’une extraordinaire souplesse instrumentale, d’une virtuosité exceptionnelle même, le quatrième mouvement prolonge la confusion d’un auditeur en peine de Mahler, malgré l’abondance des citations. Le Finale porte à son extrême le sentiment paradoxal ressenti dès le premier mouvement, la performance instrumentale (une flûte belle à pleurer, des cordes d’une grandiose perfection) ne faisant jamais oublier le statisme des masses sonores, l’anémie du style… l’abandon de Mahler en somme.


Le site de Daniel Harding


Gilles d’Heyres

 

 

 

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