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04/26/2008
«Les Folies françaises»
François Couperin : Pièces pour clavecin: Troisième Livre, 13e Ordre: «Les Folies françoises ou les Dominos» – Quatrième Livre, 25e Ordre
Claude Debussy : Préludes (Second Livre)
Olivier Messiaen : Catalogue d’Oiseaux, Septième Livre: «Le Courlis cendré»

Cédric Pescia (piano)
Enregistré au Studio Teldex de Berlin (2007) – 77’51
Claves Records 50-2719 (distribué par Intégral)



«Les œuvres italiennes sont piquantes, fleuries, expressives, les œuvres françaises naturelles, fluides, tendres» écrivait Sébastien de Roussel dans son dictionnaire de musique de 1703. Au-delà des accents néanmoins piquants et de l’expressivité de l’ensemble, le programme de ces Folies françaises, titre emprunté à Couperin, semble se poser, trois siècles plus tard, en illustration du propos de Roussel. Cédric Pescia, jeune pianiste de nationalité suisse et française, offre ici un programme tout à fait original qui souligne les liens étroits entre les conceptions musicales de trois grands compositeurs français, tous trois proches d’une Nature inspiratrice, tous trois grands innovateurs, qui illustrent les qualités que l’on attribue avec raison à la musique française : clarté, transparence, élégance et une certaine retenue. Le style de Cédric Pescia en laisse épanouir la poésie.


Le programme est composé comme celui d’un récital original, intelligent et sensible. Les douze pièces des Folies françoises de Couperin précèdent les Préludes (Livre II) de Debussy et ce sont encore des pièces de Couperin (25e Ordre) qui précèdent Le Courlis cendré de Messiaen. Un sujet commun se dessine à travers les titres qui suggèrent le portrait ou le tableau – évocation de paysages, de personnages ou d’attitudes. En effet, les trois compositeurs avaient aussi en commun le goût du titre évocateur, allusif et souvent poétique, mais chacun sans doute en refrain avec Couperin «non sans prier que l’on l’excuse de ne pas les expliquer tous». Grâce en partie aux qualités et orientations qui unissent les trois compositeurs et en partie à la nature du jeu de Cédric Pescia, l’ensemble du programme s’écoute d’affilée, comme si l’on se trouvait au concert, avec un fin plaisir sensuel et gourmet né de sa cohérence. Des rapprochements possibles, de mystérieuses correspondances naissent comme des évidences – selon les instants, sont communs aux trois compositeurs la modalité ou les tonalités floues, le chromatisme, les trilles et les trémolos, le ruissellement de notes perlées et fluides, et l’attrait de la caractérisation, tendre, acérée ou fidèle; un trait de clavecin renaît renouvelé dans les ambitus restreints et la mobilité tournoyante des «Tierces alternées»; la mélancolie intrinsèque du 25e Ordre trouve un écho dans la subtilité de celle de La Terrasse des audiences du clair de lune, de Feuilles mortes ou de Canope; l’espièglerie et la grâce imprègnent La Coquéterie et Ondine et le mystère de climats incertains Les Ombres errantes et Brouillards... «Le Courlis cendré» fait aussitôt penser aux oiseaux du 14e Ordre tout en rejoignant ici les espaces infinis de Bruyères, la puissance sombre et mouvante de La Frénésie et toute l’âpreté des oppositions intenses de La Puerta del Vino.


«Comment oublier la souplesse, la caresse, la profondeur de son toucher! En même temps qu’il glissait avec une douceur si pénétrante sur son clavier, il le serrait et en obtenait des accents d’une extraordinaire puissance expressive... Il jouait presque toujours en demi-teinte, mais avec une sonorité pleine et intense sans aucune dureté de l’attaque». Marguerite Long décrivait ainsi la nature du jeu de Debussy et, quelle qu’eût été la différence réelle entre les deux pianistes, ses mots conviennent tout à fait au style ample, agile et fluide, puissant à volonté, de Cédric Pescia. On pourrait éventuellement trouver que par moments il a le défaut de ses qualités, que son style serait trop fluide, mais sa force de conviction, son expressivité, sa musicalité et son remarquable sens du phrasé s’appliquent avec une égale hauteur de vue aux exigences de ces trente pièces merveilleuses.


Pour cet enregistrement, Cédric Pescia a choisi deux pianos Steinway & Sons différents, l’un accordé normalement pour les pièces de Debussy et Messiaen, l’autre, remplaçant le clavecin pour les pièces de Couperin, accordé «selon un tempérament proche de celui que le compositeur connaissait et utilisait». Il ne s’agit nullement de rapprocher le son du piano tant soit peu de celui du clavecin (et pourtant les amateurs de clavecin apprécieront le tempérament choisi) mais de permettre l’épanouissement de l’éloquence et de l’expressivité particulières de ces pièces grâce aux accords sans altération qui sonnent plus «justes» et à certains intervalles avec altération qui retrouvent une tension vive jusque dans la dissonance (on pense à la quinte dite «du loup»). Le résultat met encore plus en évidence les liens entre les trois compositeurs.


C’est à Cédric Pescia lui-même que l’on doit la conception de ce programme envoûtant et son parfait équilibre.


Le site de Cédric Pescia


Christine Labroche

 

 

 

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