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10/16/2007 Airs d’Il Pirata, de Bianca e Fernando de Bellini, d’Elisabetta, regina d’Inghilterra, d’Il Turco in Italia, de La Donna del lago et de Guglielmo Tell de Rossini, de Marino Faliero de Donizetti. Orchestre et Chœur de l’Académie Sainte-Cécile de Rome, Roberto Abbado (direction), Juan Diego Flórez (ténor).
Enregistré à Rome en 2006 – 71’.
Decca 475 9079. Présentation et textes trilingues.
Les admirateurs – et admiratrices – de Juan Diego Flórez, surtout s’ils ont assisté à son récent récital salle Pleyel, ne manqueront pas de se précipiter sur ce disque, où ils retrouveront une partie de son programme. Le ténor péruvien peut-il, comme on l’y présente, se poser en successeur de Giovanni Battista Rubini (1794-1854), coqueluche de l’Europe lyricomane, dont il reprend ici les rôles ? Ce dernier, on le sait, fascinait les compositeurs et le public par la beauté, l’agilité et l’étendue de sa voix : le fameux contre-fa des Puritains fut écrit pour lui, sans parler des contre-ré du Pirate.
Le ténor péruvien, cependant, n’aborde pas, comme son illustre devancier, les notes les plus élevées en voix de tête. Il n’empêche : on reste confondu devant l’éclat lumineux de ce suraigu qu’il ne force jamais, préservant ainsi l’homogénéité de la tessiture et le soleil du timbre. Il y a aussi la clarté exemplaire de l’articulation, qui n’élime en rien le velours du legato, l’aisance jubilatoire de la vocalisation, qui fait merveille dans Rossini. C’est d’ailleurs chez ce dernier que Juan Diego Flórez se montre quasi inégalable, plus sans doute dans Le Turc en Italie ou La Donna del lago - créés par un autre fameux ténor aigu et virtuose du moment, Giovanni David - que dans la version italienne de Guillaume Tell : s’il y chante superbement le fameux air « Asile héréditaire », il n’a pas toute la vaillance nécessaire – on ne peut que l’engager à ne pas se lancer dans l’intégralité du rôle, créé par le français Nourrit et que Rubini, là encore, ne fit que reprendre. On dira la même chose du Pirate, même si les contre-ré attaqués à cru dans la vocalise descendante de la cabalette sont assez stupéfiants. Bref, la voix reste plutôt légère, ce qui nous le fait préférer, par exemple, dans le Marino Faliero de Donizetti, pour le coup créé par Rubini, où sa souplesse fait merveille. A noter que l’air de La Donna del lago choisi ici est celui écrit spécialement pour Rubini lorsque ce dernier le chanta à Paris en 1825, reconstitué par Philipp Gosset, éminent spécialiste du compositeur italien, auteur de la très intéressante notice de présentation.
Plus qu’un simple feu d’artifice vocal, fait de fusées de contre-ut, contre-ré et contre-mi bémol insolents lancés à profusion, ce disque nous révèle un technicien, un styliste et, surtout, un musicien. C’est cela qui, d’abord, nous le rend si précieux.
Didier van Moere
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