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01/28/2009 Gioacchino Rossini: La Cambiale di matrimonio – La Scala di seta – L’occasione fa il ladro – Il Signor Bruschino
La Cambiale di matrimonio
John del Carlo (Tobia Mill), Janice Hall (Fanny), David Kuebler (Edoardo Milfort), Alberto Rinaldi (Slook), Carlos Feller (Norton), Amelia Felle (Clarina)
La Scala di seta
David Griffith (Dormont), Luciana Serra (Giulia), Jane Bunnell (Lucilla), David Kuebler (Dorvil), Alberto Rinaldi (Blansac), Alessandro Corbelli (Germano), Orchestre Radio-Symphonique de Stuttgart, Gianluigi Gelmetti (direction), Michael Hampe (mise en scène), Claus Viller (réalisation)
L’occasione fa il ladro
Stuart Kale (Don Eusebio), Susan Patterson (Berenice), Robert Gambill (Conte Alberto), Natale de Carolis (Don Parmenione), Monica Bacelli (Ernestina), Alessandro Corbelli (Martino), Orchestre Radio-Symphonique de Stuttgart, Gianluigi Gelmetti (direction), Michael Hampe (mise en scène), Claus Viller (réalisation)
Il Signor Bruschino
Alessandro Corbelli (Gaudenzio), Amelia Felle (Sofia), Alberto Rinaldi (Bruschino padre), Vito Gobbi (Bruschino figlio), David Kuebler (Florville), Oslavio di Credico (Un commissaire de police), Carlos Feller (Filiberto), Janice Hall (Marianna)
Radio-Sinfonieorchester Stuttgart, Gianluigi Gelmetti (direction), Michael Hampe (mise en scène), Claus Viller (réalisation)
Enregistré en public au Théâtre de Schwetzingen (1989, 1990, 1992 et 1989) – 82’, 100’, 94’ et 98’
Coffret Medici Arts 2057388. Format : 4:3. Region code : 0 (worldwide). Notice trilingue
Quatre des premiers opere buffe de Rossini, créés entre 1810 et 1813 au Teatro San Moisè de Venise, sur des livrets du même Giuseppe Foppa – sauf L’occasion fait le larron, écrit par Luigi Prividalli -, et donnés de 1989 à 1994 au festival de Schwetzingen dans un théâtre rococo merveilleusement adapté, sont ici regroupés : on ne les programme pas si souvent.
Le Mariage par lettre de change est le tout premier : un peu plus d’une heure de musique pour nous dire qu’un négociant canadien se conduit mieux que son confrère anglais qui veut lui vendre sa fille. La verve, le rythme annoncent, avec plus ou moins de timidité, le Rossini futur : on sent déjà chez ce jeune homme de dix-huit ans la « patte » du compositeur de L’Italienne à Alger. Cette timidité n’est pas absente de la mise en scène de Michael Hampe, efficace mais un peu trop sage quand il tire les ficelles du genre. Gianluigi Gelmetti, lui aussi, pourrait animer davantage cette « farce comique à représenter en musique », très subtil néanmoins, d’une légèreté mozartienne, attentifs aux couleurs. Alberto Rinaldi et Carlos Feller sont parfaits en basses bouffes, en particulier dans leur duo « Dite, presto ». David Kuebler, si fort dans les rôles de composition, ne se révèle pas idéalement rossinien, ni par la voix ni par le style, pas plus que la Fanny charmante d’Amelia Felle, tous deux très probes cependant dans leurs rôles d’amoureux, elle affrontant plutôt bien, à défaut d’y montrer du panache, les vocalises de son air.
L’Echelle de soie se reconnaît d’emblée à son Ouverture. Deux ans après Le Mariage par lettre de change, Rossini s’affirme de plus en plus. Est-ce pour cela que la direction paraît cette fois plus dynamique et plus pétillante, avec de beaux épanchements dans le duetto entre Giulia et Germano ? David Kuebler lui aussi est meilleur, plus souple surtout, et toujours aussi intelligent. Le timbre acidulé et monochrome de Luciana Serra ne convient guère au canto spianato où il faut des couleurs et ne pas fixer les sons, mais elle a le style, vocalise avec agilité et ne manque pas de pétulance. Le meilleur reste en tout cas Alessandro Corbelli, impayable dans son air de serviteur transi et ivrogne, modèle surtout de basse bouffe au chant stylistiquement exemplaire.
L’occasion fait le larron, composé la même année que L’Echelle de soie, montre un Gianluigi Gelmetti toujours aussi fin, mais peu vitaminé, manquant du grain de folie inhérent à tout buffa rossinien, même de jeunesse. Cependant il nous réserve toujours de jolis moments, comme le Quintette, dans cette histoire d’échange d’identité des futurs et des futures, comme Così fan tutte de Mozart. On retrouve avec le même plaisir Alessandro Corbelli, parfait dans l’air de Martino, valet du comte Alberto de Robert Gambill qui, sans être le ténor rossinien attendu, se tire assez bien d’affaire, avec des vocalises pas déshonorantes, sauf celles de la cabalette de son second air, dont les aigus font fuir. Natale de Carolis, en revanche, montre de l’aisance en Don Parmenione, confirmant la qualité des clés de fa rossininennes. Si Susan Patterson, qui chanta plus tard des rôles beaucoup plus lourds comme Aïda ou Tosca, n’a pas la voix idéale pour Berenice, avec certaines stridences inopportunes, elle compense ce défaut par une colorature assez déliée et un style probe à défaut d’être vraiment idiomatique, faisant assez belle figure dans « Ma se incerti voi siete » et, finalement, le duo avec Alberto est assez convaincant. Monica Bacelli, elle, sera bientôt la Despina de Riccardo Muti à Vienne.
Deux mois après L’occasion fait le larron, en janvier 1813, a lieu la création d’Il Signor Bruschino, où Rossini montre moins de verve même s’il mélange habilement les ingrédients du genre buffa. On retrouve les qualités et les défauts des autres productions. Amelia Felle a le timbre un peu rêche et la vocalise paresseuse, David Kuebler, encore un rien nasal, tient bien son rang. Côté clés de fa, Alessandro Corbelli domine ses partenaires par sa tenue et son aisance, qu’il s’agisse du Filiberto pas très délié de Carlos Feller ou du d’Alberto Rinaldi, pourtant bien en place dans la parodie du style pathétique. Ici comme ailleurs, la mise en scène manque de souffle et de rythme, relevant plutôt de la mise en place honnête. Mais les décors sont toujours très jolis.
Didier van Moere
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